Luciano Berio : Intégrale des quatuors à cordes - Quatuor Molinari

Luciano Berio : Intégrale des quatuors à cordes - Quatuor Molinari

Cette intégrale des quatuors à cordes de Berio par le Quatuor Molinari est une référence contemporaine incontournable. Elle conjugue virtuosité, intelligence musicale et sensibilité expressive. La lecture de chaque quatuor révèle la diversité et la profondeur de l’univers berien, de la jeunesse avant-gardiste de Study à la maturité introspective de Glosse. Malgré une légère perte de densité sonore liée à l’acoustique, l’enregistrement demeure lumineux, précis et captivant. Pour les mélomanes avertis, cet enregistrement est une immersion totale dans l’univers complexe, dramatique et fascinant de Berio, offrant une expérience d’écoute à la fois exigeante et profondément gratifiante.















ATMA Classique - ACD22848
Note: 4,5/5


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Les cinq quatuors à cordes de Luciano Berio, composés entre 1952 et 1997, constituent un panorama fascinant de son évolution artistique. Ces œuvres explorent des territoires très variés, du jeune compositeur héritier de l’avant-garde viennoise aux pièces plus mûres et réflexives, intégrant la voix, la dramaturgie et une palette expressive extrêmement riche. L’intégrale du Quatuor Molinari met en lumière la cohésion de la pensée berienne malgré l’écart stylistique entre les pièces.

L’enregistrement dans l’église de Mirabel offre une acoustique vaste et réverbérante qui confère une image spatiale ample. Si cette réverbération atténue légèrement le grain des instruments, elle préserve la précision de la localisation des quatre voix, donnant à l’écoute une perspective unique sur la polyphonie complexe de Berio.

Première étape de l’évolution de Berio, Study témoigne d’un compositeur en formation, influencé par l’écriture de Webern. Le Quatuor Molinari en capture parfaitement le caractère à la fois incisif et impersonnel, mettant en valeur la rigueur de l’écriture et la précision des motifs. L’interprétation cisèle les détails de l’écriture imitative tout en préservant la fluidité du discours, donnant au langage berien sa vitalité initiale. Les nuances sont traitées avec une grande délicatesse, et la ligne mélodique se déploie avec clarté dans l’acoustique réverbérée, sans jamais devenir confuse.

Le Quartetto illustre l’entrée de Berio dans le domaine du sérialisme intégral. Les quatuoristes affrontent avec succès les exigences techniques de cette partition, qui alterne intensités extrêmes et changements abrupts de timbre et de tempo. Les Molinari réussissent à rendre ce maillage complexe intelligible, transformant ce qui pourrait sembler fragmentaire en un discours musical cohérent et expressif. L’attention portée aux détails — pizzicati, arcs frappés ou grattés, utilisation précise du talon et de la pointe — montre une maîtrise totale et une sensibilité aux contrastes dynamiques et aux textures multiples.

Dans Sincronie, Berio pousse l’expérimentation polyphonique à son apogée, stratifiant les quatre instruments comme s’il en avait seize voix indépendantes. L’interprétation du Quatuor Molinari met en relief les moments de convergence et de divergence avec un équilibre impressionnant. Chaque instrument conserve son autonomie, tout en participant à l’architecture globale de la pièce. Les passages méditatifs et les explosions de violence sonore sont rendus avec intensité et subtilité, soulignant le génie de Berio pour la construction dramatique et l’effet de surprise.

Notturno marque une étape tardive et introspective dans l’évolution de Berio. L’accent est mis sur la dimension vocale et narrative, avec des indications de caractère détaillées et des fragments de « discours incomplets » qui construisent un véritable récit musical. Les Molinari traduisent avec sensibilité ces non-dits, chaque nuance de « molto lontano e parlando » à « sospeso » étant rendue avec justesse. La pièce, souvent contemplative, conserve une tension dramatique constante, et la précision polyphonique du quatuor assure une continuité impeccable sur vingt sections.

Glosse est une pièce réflexive, une sorte de commentaire sur un quatuor non abouti. Les Molinari en saisissent l’esprit capricieux et la complexité interne, en mettant en valeur les contrastes et la vitalité de l’écriture. Leur interprétation est plus chaleureuse et vibrante que certaines références historiques, et la direction de la phrase musicale démontre une énergie solaire qui rend cette pièce complexe à la fois accessible et captivante. La richesse des textures, le jeu sur les dynamiques et l’ampleur expressive confèrent à Glosse une dimension spectaculaire et irrésistiblement vivante.

L’enregistrement bénéficie d’une transparence remarquable, malgré la réverbération naturelle de l’église qui atténue légèrement le grain des instruments. L’équilibre entre précision polyphonique et perspective spatiale est respecté, offrant une écoute très satisfaisante, surtout pour la musique contemporaine complexe de Berio. La restitution sonore permet d’apprécier la finesse des détails techniques et la richesse des couleurs instrumentales.

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