Baldassare Galuppi – Wonder in Venice. Sonates et Concertos pour Clavecin - Arianna Radaelli, clavecin et direction – La Filarete

Baldassare Galuppi – Wonder in Venice. Sonates et Concertos pour Clavecin
Arianna Radaelli, clavecin et direction – La Filarete

L’interprétation brillante et sensible d’Arianna Radaelli, alliée à la qualité sonore et à la cohérence de La Filarete, fait de cet enregistrement une référence incontournable pour qui souhaite découvrir la richesse du Galuppi claveciniste et concertant.

Arcana (A579)
Note: 4,5/5

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Surnommé Il Buranello en raison de ses origines sur l’île colorée de Burano, Baldassare Galuppi reste surtout connu comme compositeur d’opéras comiques vénitiens, mais son répertoire instrumental et liturgique témoigne d’une inventivité et d’une subtilité qui méritent une attention renouvelée. Wonder in Venice offre un panorama soigneusement choisi de cette musique pour clavier et cordes, rassemblant trois sonates et deux concertos. Le programme met en lumière l’équilibre qui traverse l’œuvre de Galuppi, entre un style galant lumineux et une expressivité plus dramatique, capable de surprendre par sa profondeur et sa tension. L’alternance entre sonates intimes et mouvements concertants permet d’apprécier la flexibilité du clavecin, tantôt soliste éclatant, tantôt moteur d’un dialogue avec le quintette, dans un répertoire où virtuosité et expressivité se mêlent naturellement.

Arianna Radaelli impose une lecture à la fois précise et vivante. Son jeu se distingue par une articulation nette et un rubato subtil qui respectent le style tout en offrant un souffle théâtral. Dans la Sonate en fa majeur, l’Andantino initial, délicatement phrasté, contraste avec l’Allegro galant qui suit, d’une verve théâtrale parfaitement maîtrisée. La Sonate en ré majeur, redoutable sur le plan technique, se déploie avec une espièglerie et une légèreté qui renforcent l’élan galant, tandis que la Sonate en si bémol conjugue virtuosité et sensibilité expressive. Les deux concertos constituent le cœur dramatique du disque : le Concerto en fa majeur brille par la clarté des dialogues entre clavecin et cordes, et le Concerto en ut mineur impose son intensité élégiaque et son énergie dramatique, révélant la capacité de Galuppi à conjuguer couleurs affectives et rigueur formelle.

L’instrument choisi pour ce disque, une copie milanaise d’un Christian Vater de 1738 réalisée par Andrea Restelli, restitue des timbres riches et charnus, parfaitement adaptés à la virtuosité et à la variété expressive des pièces. La captation, effectuée dans l’église Saint-Pantaleon de Nuglar, privilégie la proximité, donnant au clavecin un relief et une présence immédiats, mais tendant parfois à épaissir la texture. Le quintette à cordes, disposé sur un même plan sonore, déploie une densité impressionnante et s’entrelace avec le clavier dans une écriture contrapuntique claire, bien que cette densité puisse rendre la légèreté galante moins évidente par moments. Cette approche confère cependant à l’enregistrement une immédiateté et une intensité dramatiques qui servent pleinement la dimension théâtrale de l’œuvre.

Radaelli et La Filarete font preuve d’une complicité musicale qui se traduit par une cohérence stylistique et une fluidité remarquable. Les dialogues entre clavecin et ensemble sont parfaitement équilibrés, les accents expressifs et la dynamique subtilement modulée, et les choix de phrasé et d’ornementation révèlent des couleurs inattendues, tantôt légères et chatoyantes, tantôt plus sombres et élégiaques. L’album restitue ainsi l’esprit vénitien de la musique de Galuppi, où la grâce et la théâtralité se répondent dans une écriture d’une finesse rare.

Wonder in Venice s’impose comme une anthologie passionnante et richement nuancée. L’interprétation brillante et sensible d’Arianna Radaelli, alliée à la qualité sonore et à la cohérence de La Filarete, fait de cet enregistrement une référence incontournable pour qui souhaite découvrir la richesse du Galuppi claveciniste et concertant. Malgré quelques limites liées à la densité sonore et à l’uniformité relative de l’approche, le disque restitue avec fidélité et virtuosité l’univers contrasté de l’un des compositeurs vénitiens les plus inventifs du XVIIIᵉ siècle. Cette lecture vivante et engagée place Galuppi au sommet de sa discographie instrumentale, offrant aux mélomanes avertis une expérience à la fois éclairante, séduisante et profondément musicale.

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