José de Nebra : Venus y Adonis - Los Elementos - Alberto Miguélez Rouco
José de Nebra : Venus y Adonis - Los Elementos - Alberto Miguélez Rouco
Une redécouverte fascinante de l’opéra espagnol baroque
Acheter cet album
Accéder à la chaîne Altea Media I Love TV
Si le nom de José de Nebra demeure encore aujourd’hui méconnu en dehors des cercles spécialisés, il est pourtant l’un des plus grands compositeurs espagnols du XVIIIᵉ siècle, maître du style hybride mêlant influences italiennes et traditions ibériques. Avec Venus y Adonis, l’ensemble Los Elementos, dirigé par Alberto Miguélez Rouco, nous plonge dans un univers musical d’une rare finesse, porté par une interprétation qui allie rigueur et sensibilité.
Composé en 1729, Venus y Adonis appartient à ces opéras de cour qui tentaient d’infuser le modèle italien dans une dramaturgie espagnole. On y retrouve les éléments caractéristiques du genre : arias da capo, ensembles contrastés, et un continuo foisonnant. Mais ce qui frappe ici, c’est la façon dont Nebra, loin de se contenter d’un pastiche vivaldien, insuffle une chaleur typiquement espagnole, notamment à travers les rythmes de danse et l’orchestration lumineuse.
La redécouverte de cette œuvre est en soi un événement. Longtemps restée dans l’ombre, la partition a nécessité un travail minutieux de reconstruction, certaines parties étant manquantes. La restitution proposée ici est convaincante, bien que l’on puisse s’interroger sur certains choix de reconstitution. L’équilibre entre fidélité musicologique et interprétation artistique est cependant habilement maintenu, offrant une lecture à la fois historiquement informée et vivante.
Sous la direction inspirée d’Alberto Miguélez Rouco, Los Elementos livrent une interprétation d’une grande vitalité. L’orchestre, animé par un continuo incisif et expressif, insuffle aux récitatifs une dynamique quasi théâtrale. Les cordes, d’une élégance rare, dialoguent avec les bois dans une expressivité toujours subtile, sans jamais sombrer dans l’excès ou la surcharge affective.
Le choix d’une distribution exclusivement féminine confère à l’ensemble une homogénéité vocale singulière. Si cette approche renforce une certaine unité sonore, elle peut aussi parfois créer une confusion dans la caractérisation des rôles. Paola Valentina Molinari incarne une Vénus ardente et noble, tandis que Natalie Pérez offre un Adonis d’une douceur touchante, notamment dans son air d’adieu, poignant de simplicité. Les voix se mêlent avec grâce dans les ensembles, particulièrement dans les passages plus dramatiques où l’intensité expressive culmine.
Le registre plus léger n’est pas en reste : le duo comique formé par Clarín et Celfa apporte un contrepoint savoureux à la solennité du drame. Le fameux "duo des poules", qui pastiche les codes de l’opéra seria en leur injectant un humour typiquement espagnol, est interprété avec un sens du rythme et une articulation impeccables.
Cette version peut être saluée pour sa fraîcheur et son engagement, mais certains points suscitent des réserves. On pourrait par exemple reprocher l'uniformité des timbres vocaux, qui peut rendre plus difficile la distinction entre les différents personnages, en particulier dans les scènes d’ensemble, ou soulever la question de la reconstruction de certaines sections, soulignant un possible éloignement de l’esthétique originale.
Malgré ces quelques réserves, il s’agit incontestablement d’une interprétation de référence, qui permet enfin à Venus y Adonis de retrouver la place qu’elle mérite au sein du répertoire baroque. La direction inspirée, la qualité du continuo et l’engagement des chanteuses en font un enregistrement essentiel pour tout mélomane curieux d’explorer le patrimoine lyrique espagnol.
Acheter cet album
Accéder à la chaîne Altea Media I Love TV
Commentaires
Enregistrer un commentaire