Desmarest & Campra - Iphigénie en Tauride - Véronique Gens, Reinoud Van Mechelen, Thomas Dolié, David Witczak, Olivia Doray, Floriane Hasler, Tomislav Lavoie – Le Concert Spirituel, Hervé Niquet

Desmarest & Campra - Iphigénie en Tauride - Véronique Gens, Reinoud Van Mechelen, Thomas Dolié, David Witczak, Olivia Doray, Floriane Hasler, Tomislav Lavoie – Le Concert Spirituel, Hervé Niquet

Un disque indispensable pour tout amateur de tragédie lyrique et de musique baroque. Un triomphe absolu.

Alpha Classics ALPHA1106
Note : 5/5

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Longtemps restée dans l’ombre de la version plus célèbre de Gluck, Iphigénie en Tauride de Henry Desmarest et André Campra ressurgit aujourd’hui avec éclat grâce à cet enregistrement, qui s’impose immédiatement comme une référence. Cette œuvre, fruit de la collaboration entre deux des plus grands compositeurs du Grand Siècle, dévoile une richesse musicale insoupçonnée. L’écriture raffinée de Desmarest, marquée par des récitatifs expressifs et une harmonie subtile, se marie à merveille avec la fluidité mélodique et le sens dramatique aiguisé de Campra.

Dès les premières notes, on perçoit une dramaturgie foisonnante, où le destin tragique d’Iphigénie se tisse avec un soin minutieux. L’équilibre entre solistes, chœurs et orchestre confère à cette partition une profondeur qui la hisse parmi les grandes tragédies lyriques françaises.

À la baguette, Hervé Niquet insuffle une énergie dramatique qui porte l’œuvre à son paroxysme. Loin de toute lourdeur académique, sa lecture met en exergue les contrastes expressifs de la partition, alternant avec finesse entre tension et recueillement. L’orchestre du Concert Spirituel, d’une cohésion exemplaire, restitue toute la richesse des couleurs orchestrales, depuis les éclats les plus véhéments jusqu’aux nuances les plus délicates.

Les chœurs, élément central de cette tragédie lyrique, brillent par une diction d’une clarté absolue et un engagement dramatique saisissant. Chaque intervention collective amplifie la tension du récit et confère à certaines scènes un souffle presque cinématographique.

Quelques passages auraient pu gagner en dynamisme, notamment dans les premières scènes, où un tempo plus incisif aurait renforcé l’impact dramatique. Néanmoins, l’ensemble demeure d’une précision et d’une expressivité impressionnantes.

Impossible de ne pas être frappé par l’incarnation magistrale de Véronique Gens dans le rôle-titre. Son interprétation, sobre mais intensément expressive, capte avec une justesse rare toute la douleur et la noblesse du personnage. Chaque mot, chaque inflexion de sa ligne de chant résonne avec une émotion palpable, donnant à cette Iphigénie une aura tragique bouleversante.

À ses côtés, Thomas Dolié livre un Oreste habité, déchiré entre folie et rédemption. Son timbre chaud et sa diction irréprochable renforcent la puissance dramatique du rôle. Reinoud Van Mechelen, en Pylade, apporte une lumière bienvenue avec un phrasé élégant et une musicalité d’une grande sensibilité.

Les rôles secondaires ne sont pas en reste : Olivia Doray et Floriane Hasler se distinguent par une expressivité marquante, tandis que David Witczak et Tomislav Lavoie apportent une assise vocale solide à leurs personnages respectifs.

Avec cet enregistrement, cette Iphigénie en Tauride retrouve enfin la place qu’elle mérite au panthéon de l’opéra baroque français. Une direction inspirée, un orchestre somptueux et une distribution vocale de haut vol font de cette version une référence absolue. Certains pourront regretter un léger manque de tension dramatique dans quelques passages, mais la qualité globale de l’interprétation compense largement ce point.

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