Destinées - Sophie de Bardonnèche (violon), Lucile Boulanger (viole de gambe), Justin Taylor (clavecin)
Destinées - Élisabeth Jacquet de La Guerre, Mademoiselle Laurent, Mademoiselle Duval, Marie-Christine Fumeron, Madame Talon
Sophie de Bardonnèche (violon), Lucile Boulanger (viole de gambe), Justin Taylor (clavecin)
Destinées réussit son pari : redonner vie à des œuvres injustement oubliées et offrir aux auditeurs modernes une perspective nouvelle sur l’histoire de la musique baroque. Ce disque s’impose comme un véritable manifeste pour la reconnaissance des compositrices de cette époque, porté par des interprètes inspirés et engagés.
Alpha Classics ALPHA1078
Note : 4/5
Avec Destinées, le label Alpha Classics propose une plongée fascinante dans l’univers des compositrices françaises des XVIIe et XVIIIe siècles. Menée par le trio virtuose composé de Sophie de Bardonnèche, Lucile Boulanger et Justin Taylor, cette exploration dévoile des pages méconnues d’un répertoire qui, bien que mérité, reste largement éclipsé par les figures masculines de l’époque.
Ce disque, à la fois hommage et manifeste artistique, réunit des œuvres signées Élisabeth Jacquet de La Guerre, Mademoiselle Laurent, Mademoiselle Duval, Marie-Christine Fumeron et Madame Talon. Chacune de ces compositrices a su, en dépit des contraintes sociales et culturelles de leur temps, créer des œuvres d’une remarquable inventivité. Destinées ne se contente pas de restituer ces pièces, il les inscrit dans une démarche interprétative brillante et moderne.
Le choix du programme illustre une diversité d’approches et de styles. Les sonates d’Élisabeth Jacquet de La Guerre, d’une virtuosité maîtrisée, côtoient les textures plus pastorales de Mademoiselle Laurent. Mademoiselle Duval, première femme à avoir vu son opéra joué à l’Académie royale de musique, livre des pages d’une grande intensité dramatique, tandis que les compositions de Fumeron et Talon se distinguent par leur subtilité et leur lyrisme.
Le fil narratif de l’album est habilement tissé, et chaque pièce semble dialoguer avec la suivante, créant une cohérence rare dans ce type d’enregistrement.
L’alchimie entre Sophie de Bardonnèche, Lucile Boulanger et Justin Taylor est indéniable. Le violon de Bardonnèche chante avec une clarté et une expressivité qui capturent l’essence même de ces œuvres. Sa capacité à passer d’un phrasé galant à des élans plus dramatiques apporte une dynamique captivante à chaque interprétation.
Lucile Boulanger, quant à elle, confirme sa place parmi les meilleurs gambistes de sa génération. Son jeu, profond et nuancé, confère une dimension poignante aux lignes de basse et aux dialogues avec le violon. Justin Taylor, au clavecin, complète ce trio avec un art du continuo parfaitement dosé. Son toucher précis et son sens inné de la rhétorique baroque enrichissent chaque pièce, tout en laissant aux deux autres instruments une liberté d’expression admirable.
La prise de son, typique des productions d’Alpha Classics, atteint un équilibre parfait entre intimité et clarté. Chaque instrument est capté avec une précision qui met en valeur la richesse des textures et des couleurs. Le clavecin, souvent sous-représenté dans ce type de formation, brille ici d’une présence chaleureuse et vivante.
Malgré les nombreuses qualités de cet enregistrement, on pourrait espérer davantage de contrastes dans certains passages. Les moments les plus dramatiques, notamment dans les œuvres de Mademoiselle Duval, auraient pu être explorés avec une expressivité encore plus marquée. De même, une approche plus audacieuse dans l’ornementation aurait pu renforcer l’impact émotionnel de certaines pièces.
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